milliers voire des millions de personnes. J'aimais toujours autant danser, mais les petites soirées privées que nous organisions chacun notre tour me convenaient bien mieux. Je me proposai pour garder le village, et tout le monde fut satisfait ; je devins pour deux mois la gardienne de notre petit territoire.
Et c'est un soir, une quarantaine de jours plus tard, que je vous vis, vous deux, avec votre chargement. Le bracelet n'indiquait pas de signe d'agressivité, je restai toutefois sur mes gardes. Vous ne sembliez pas parler notre langue, et mon bracelet ne détecta pas l'origine de la votre, ce qui compléta mon étonnement. Erik me montra le corps de votre ami, je compris qu'elle était morte depuis longtemps, le bracelet ne détectant même pas de signaux électriques résiduels. Rapidement je me mis en contact avec les habitants du village, et leur donnai le visuel de la situation. Le résultat fut mitigé, certains préconisèrent une mise en quarantaine pour observation, d'autres un simple isolement dans l'attente de leur retour. Erik s'énerva alors un peu, haussant la voix. Les villageois me donnèrent carte blanche pour vous maîtriser. Je décidai de vous emmener dans un premier temps dans un chalet prison. Quand à votre amie, j'appelai un assistant pour en transporter le corps dans un caisson d'hibernation en attendant une décision ultérieure. Le caisson confirma un état de mort avancée, et sans bracelet ni origine impossible de déterminer le lieu de la dernière sauvegarde. Je tentai à tout hasard d'indiquer les bâtiments dans le cratère près desquels nous vous vîmes pour la première fois, mais sans succès, le journal d'activité était vide.
Les quelques jours qui suivirent nous commençâmes à faire connaissance. Je sentais une tension entre vous deux, sans doute à cause de votre amie, mais je n'avais pas les moyens de vous expliquer clairement la situation. J'aurais bien pu vous projeter quelques images mentales en espérant que vous compreniez leur signification, mais je préférais que tout progressât à son rythme, de toute façon une fois cryogénisée nous pouvions attendre des années sans que la situation de votre amie n'évoluât. Et puis nous n'avions pas vraiment une notion du temps identique à la votre.
Les jours suivants m'amusèrent, quand tu tentais tant bien que mal d'apprendre la langue, ou de faire tes dessins dans le sable. C'était à la fois tellement... Primitif ? Et
attendrissant... Comme un petit enfant qui essaie coûte que coûte de se faire comprendre par son nounours. Les villageois sont arrivés un peu plus tôt que prévu, sans doute curieux de vous rencontrer. Pour être franche j'espérais qu'Erik y trouverait compagnie et que je puisse continuer à me divertir avec toi. Mais de toute évidence ma compagnie te plaisait aussi, et c'est ainsi que nous passâmes tout ce temps ensemble.
Nous étions tombés d'accord pour vous laisser encore dans le chalet prison quelques temps, jusqu'à ce que tout le monde soit convaincu qu'il n'y eût aucun danger. L'expert du village en téléportation n'était pas présent, il se trouvait sur la planète de ses enfants, et quand nous l'avons consulté il nous dit que la perte des journaux de téléportation est quelque chose qui n'arrive jamais, et qu'il pouvait difficilement nous aider. Il nous conseilla d'attendre son retour, dans quelques sixièmes, pour aller de nouveau jeter un coup d'oeil au centre de téléportation par lequel vous disiez être arrivés. J'étais impatiente, chose rare à mon âge, et j'y allai moi-même refaire une inspection, mais toute la documentation que j'avais ne me permit pas de retrouver la trace de votre passage. Les centres de téléportation étaient hautement contrôlés, et dans l'historique aucun incident de ce genre ne s'était produit depuis des milliers d'années. Bien sûr les chances pour qu'un problème arrivât n'était pas complètement nulles, mais votre cas semblait tout de même bien étrange.
En plus d'y trouver une occupation, j'étais vraiment curieuse de savoir les tenants et les aboutissants de cette affaire. Retrouver des personnes qui ne connaissaient pas la langue, venant d'un téléporteur n'ayant gardé aucune trace n'était pas chose courante. Tu faisais beaucoup d'efforts, à la fois pour apprendre, mais aussi pour me faire rire. J'avais une sensation bizarre, je me demande si tu ne cherchais pas à me séduire. Le bracelet indiquait bien une attirance. Ce n'était pas très honnête de l'utiliser toutefois, je savais à peu près ce que tu pensais et tu ne pouvais pas t'en protéger. Mon avantage était toutefois atténué par le fait que ta structure mentale était peu commune, un peu comme celle d'Erik, et que tes références et ta langue m'était inconnues. Mais j'avoue avoir maintes fois sondé ton esprit, trop curieuse d'en apprendre plus.
J'aimais me promener avec toi dans la forêt environnante et