je le retrouve le mardi matin avec comme seule excuse qu'il a passé le week-end à aider un malheureux qui a soi-disant fait une tentative de suicide et a perdu la mémoire ? Bien sûr, pas un seul coup de fil du week-end, et pas la moindre trace du malheureux en question !
- C'est vrai que c'est un peu gros... Vous pensez qu'il est parti avec une autre ?
Elle ferma les yeux et lèva les mains comme pour repousser toute cette histoire, sa voix dérailla :
- Bah ! Je m'en moque ! Il peut bien faire ce qu'il veut avec qui il veut, ce n'est plus mon problème. Il était beaucoup trop compliqué pour moi de toute façon.
Elle se reprit :
- Enfin... Ça m'a tout de même inspiré un livre, c'est déjà ça... Mais parlons d'autre chose... Et vous ? Que faites-vous ?
Thomas ne sut pas trop si mentir ou pas, mais après tout il pouvait tenter de l'impressionner, et quoi de mieux pour une romancière que de rencontrer un policier dans une histoire bizarre :
- Je suis policier. Et plus exactement j'enquête sur un meurtre...
Elle écarta les yeux de surprise.
- Oh ! Vraiment, un meurtre ici, sur l'Île de Ré ? Mais vous n'êtes pas d'ici, si ?
- Non, non, je ne suis pas d'ici, je viens de la région parisienne. Le meurtre a eu lieu là-bas, mais nous avions peut-être une piste sur l'Île de Ré. À vrai dire nous avons tellement peu d'éléments que la moindre piste est bonne, le moindre indice.
- Vous pensez que le criminel peut se trouver sur l'Île ?
- J'ai cru à un moment peut-être, mais c'est plus parce qu'il est plus simple de chercher sur une petite île que dans la France entière...
Thomas se dit qu'il ne devait pas en dire plus, qu'il ferait mieux de partir, de rentrer à Paris. Ça ne servait à rien de vouloir la séduire, de toute façon il ne pourrait pas faire l'amour avec elle. Sa brûlure était toujours sa malédiction et elle le poursuivrait pour toujours, il resterait seul et rien ne servait de se torturer en tentant le diable. Elle sentit son hésitation, et celle-ci l'intrigua, elle se rapprocha un peu et parla plus doucement :
- Vous ne pouvez pas trop en parler, peut-être ? Et qui était la victime ?
Lui dire, ne pas lui dire. Elle était si belle. Après tout, peut-être qu'elle comprendrait ?
- Ma petite amie...
- Oh !
Elle eut une exclamation, ses yeux pétillèrent, elle se tourna légèrement, se rapprochant encore de lui, il sentit son parfum :
- Mon Dieu, mais, c'est quelqu'un qui vous en veut vous croyez, un ancien bandit que vous aviez arrêté ?
C'était trop tard, il lui en avait déjà bien trop dit. Le serveur passa pour lui demander son choix. Il n'avait même pas regardé la carte, il commanda le plat du jour. Sa voisine s'écarta un peu, mais aussitôt le serveur reparti se retourna vers lui. Il décida de rester vague :
- Je ne sais pas. Nous avons tellement peu de pistes. Ça peut être n'importe qui. J'en viens à me demander moi-même si je la connaissais vraiment.
Elle eut un petit mouvement de la tête, marquant son étonnement :
- C'est une femme ? Ah non votre petite amie, pas le meurtrier. Vous pensez qu'elle aurait pu tremper dans des histoires peu recommandables ? Vous la connaissiez depuis longtemps ?...
Elle se rétracta subitement, posa sa main sur la manche de Thomas :