page 152 le patriarche 153

passé huit ans à apprendre des trucs dont je me souviens à peine pour arriver dans un monde qui ne me convient pas avec des métiers inhumains qui ne me plaisent pas à n'entendre que des trucs bidons sur la réussite et le bien et le mal et ma mère qui n'arrête pas de me dire que je perds mon temps...

- Le monde est compliqué, c'est pas évident de trouver sa place.

- Il est mal foutu, oui, on se rejette tous la faute, c'est la faute aux politiciens, c'est la faute aux immigrés, c'est la faute à la Chine, c'est la faute aux État-Unis, aux riches, aux pauvres... En fait personne ne maîtrise rien et se contente de prendre sa part du gâteau quand il le peut, et tant pis pour les autres...

Thomas soupira, Carole soupira. Elle vit un beau jeune-homme torse nu passer, qui lui donna envie, et elle se dit qu'elle ferait mieux d'écrire ses notes avant des les oublier, plutôt que de penser à des choses pareilles. Il ne fallut pas longtemps à Thomas pour s'endormir, il était si bien, là. La sensation de chaleur et de soleil lui faisait tout oublier, oublier cette histoire, Carole, ses envies, ses questions. Il n'avait plus envie que d'une chose, rester là pour toujours, il se moquait du reste.

Carole passa plus d'une heure à transcrire l'histoire d'Étienne, et une autre à regarder les jeunes faire leur figure, ou à inscrire questions sur questions sur ses notes, ou encore tenter de mettre en place une théorie ou une autre. Puis elle finit par en avoir marre d'entendre Thomas ronflouner, elle se leva pour faire quelques pas, aller voir d'un peu plus près la mer, avec les baigneurs, encore bien nombreux sous un si beau soleil. Elle revint vers le banc et poussa Thomas du pied.

- Allez, debout !

Thomas s'était profondément endormi, il ronchonna.

- Allez ! Ça fait au moins deux heures que tu dors, debout !

- Deux heures ! Tu déconnes, ça fait dix minutes qu'on est là !

- Dix minutes ! Et puis quoi encore, regarde l'heure, il est

presque quatre heures !

Thomas regarda sa montre en plissant les yeux pour ne pas être ébloui.

- Quatre heures ! Non ? Mince, oui.

- C'est vraiment le monde à l'envers, c'est toi le détective et c'est moi qui fait tout ! Bon j'ai réfléchi, et je pense que tu as raison.

- Ah, bien. Tu vois, j'ai bien fait de dormir.

- Non, j'ai tenté de trouver une explication logique, et une explication pas logique. Le problème de la pas logique, c'est qu'il n'y a pas de limites, je peux dire que Seth est immortelle, mais aussi que Ylraw l'est, ou même que Seth et Ylraw sont la même personne... Alors que c'est plus intelligent, je pense, de se baser sur une hypothèse crédible et de tenter de la valider.

- C'est ce que j'ai toujours dit.

- Ce qui me gène dans ce cas, c'est qu'alors le récit d'Élisabeth ne nous sert à rien, c'est une fausse piste, pourtant Mathieu Tournalet est allé dans la maison de la Seth dont elle a parlé, puisque tu as vu toi même la lettre qu'elle a écrite. Si on considère que ces deux Seth sont différentes, alors Mathieu Tournalet et Fabrice se trompe sur la Seth qu'ils ont trouvé, et je trouve ça bizarre.

- Il suffit que Mathieu se soit trompé, ensuite moi, Fabrice, puis nous, nous n'avons fait que suivre.

- C'est vrai, mais est-ce que ça veut dire que c'est une fausse piste ? Et alors, qu'est-ce qu'on peut faire maintenant, si on laisse tomber cette Seth ?

- J'en sais rien. Qu'est-ce qu'on cherche, après tout ?

Carole se demanda si Thomas serait près à laisser tomber.

- Tu ne cherches rien, toi ? Tu serais près à oublier cette