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n'ai pas pu m'empêcher de te prendre encore dans mes bras pendant de nombreuses secondes. Erik t'as expliqué que lui aussi était guéri de ses blessures. Tu nous as posé une foule de questions mais malheureusement nous n'en savions pas beaucoup plus que toi, un peu comme maintenant. J'étais vraiment rassurée de nous voir à nouveau réunis, même si rien ne nous expliquait encore où nous étions et surtout ce qu'il se passait. Mais je crois bien que d'être avec toi était tout ce qui m'importait, je te faisais confiance pour le reste.

Quand vous avez, à chacun votre tour, bien regardé que ce que je disais sur la grille était vrai, parce que bien sûr ni l'un ni l'autre vous ne m'aviez cru, et qu'il était impossible de trouver un moyen de l'ouvrir, nous avons tenté tous les trois de réfléchir un peu plus à la situation. Une de tes premières suppositions a été de faire référence à Matrix, le film. Le plus fou c'est que tu avais vraiment l'air sérieux quand tu racontais que nous nous étions réveillés de notre monde antérieur qui n'était en réalité qu'un rêve, et que c'était le vrai monde dans lequel nous nous trouvions à présent. Mais Erik a été plus terre-à-terre et il t'a rappelé qu'il se souvenait que les hommes nous avaient transportés dans des tubes après de longs couloirs et escaliers, et qu'ils venaient de nous déplacer de nouveau de tubes identiques à travers d'autres couloirs, laissant supposer que nous étions toujours dans la banlieue de Sydney, là même où ils nous avaient conduits avec le fourgon. D'après lui ces couchettes ne devaient être qu'un moyen pour nous soigner. Mais tu nous as fait remarqué que cette hypothèse n'expliquait pas vraiment tout :

- Mouais, c'est sûrement le plus proche de la réalité, mais combien de temps sommes-nous restés à l'intérieur ? Pour que nos blessures disparaissent, même en considérant que cette technique permette une accélération des activités biologiques du corps humains, il faudrait plusieurs semaines pour qu'il ne reste que des marques si insignifiantes de nos blessures ! J'étais quand même presque mort !... Je n'ai pas fait attention, mais vous n'auriez pas vu une horloge ou un truc du genre entre la salle des tubes et ici ?

Je t'ai avoué tout comme Erik que j'étais bien trop préoccupée pour penser à ce genre de détails. Tu a poursuivi :

- Si ces hommes voulaient faire quelque chose de nous, je ne

pense pas qu'ils auraient eu la patience de nous laisser croupir pendant des semaines dans ces tubes. Sauf s'ils voulaient juste nous empêcher de nuire, enfin m'empêcher de nuire, parce que je ne pense pas que vous ayez quoi que ce soit à voir dans cette histoire.

Erik a continué le raisonnement :

- Et même s'ils voulaient juste t'éloigner pourquoi te soigner ? Pourquoi ne pas t'avoir simplement laissé mourir de tes blessures ?

- Oui tu as raison. Ils veulent forcément quelque chose de nous, ou de moi. Ça tendrait donc à soutenir que nous ne sommes pas restés trop longtemps dans ces tubes. Mais nous n'avons absolument aucun élément qui nous permette de déterminer ni l'heure ni la date. Il ne fait pas très chaud, mais même en plein été si nous sommes à plusieurs dizaines ou centaines de mètres sous terre il est impossible de faire la différence entre l'été et l'hiver.

Pour être francs nous n'avions Erik et moi pas beaucoup plus d'idées. Tu as jeté à nouveau un coup d'oeil à la fermeture de la grille, mais elle était solidement maintenue par une sorte de serrure électronique, un gros boitier avec des lumières. Même en nous y mettant tous les trois nous n'avions aucun espoir de la faire bouger, les tiges de fer faisaient au moins trois centimètres. Il ne nous restait guère plus qu'à attendre. J'ai même commencé à douter un peu de toi, avec toutes ces histoires :

- Mais que te veulent ces hommes ? Qui es-tu pour eux ? Qu'est-ce que tu as fait ? Ou à eux, qu'est ce que tu leur as fait ? Est-ce que tu m'as vraiment tout raconté ?

- Je ne crois pas avoir oublié de choses importantes. Pourquoi ? Tu penses que je te cache des choses ? C'est vrai que je suis profondément désolé de vous avoir entraînés dans ces histoires, même si je suis bien content de ne pas me retrouver seul ici.

Erik a tenté de nous remonter un peu le moral.

- De toute façon ma vie était merdique, alors...