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L'immeuble avait un autre avantage de taille, c'est qu'il possédait un important centre de téléportation intégré couplé à une armada de clone disponible. Le principal problème technique de la téléportation résidait dans la nécessité de conserver sur place un clone non différencié qui était modelé lors de la téléportation pour prendre l'apparence de la personne. Ce modelage prenait du temps, souvent de l'ordre de trois jours. Pour des événements de courtes durée cette limite constituait un handicap, et beaucoup y préférait un transfert partiel dans un clone non humain. Ces derniers étaient modelable en quelques heures par les générateurs et pouvaient accueillir pour quelques jours l'esprit d'une personne. Tout le monde s'accordaient sur leur utilité pour ce genre de besoin, tout en étant d'accord sur le fait qu'il ne fallait pas leur donner une espérance de vie trop longue. Ils n'étaient pas vraiment humains, ne procuraient pas exactement les mêmes sensations qu'un corps réel, et par le passé des personnes trop longtemps présentes dans un tel clone tombaient au bout de quelque temps irrémédiablement dans une dangereuse dépression.

Bref, si certains chercheurs, voulant profiter de l'occasion pour passer quelques temps sur Ève avait choisi la téléportation classique, et seraient réveillés quelques heures plus tard pour le début de la manifestation, la majeure partie des participants seraient synchronisé dans la matinée dans un clone artificiel, l'opération ne prenant que deux à trois heures (quatre à cinq sixièmes). Si l'immeuble, qui répondait au doux nom de Symphone, s'occuperait de tout pour rendre leur accueil aussi doux et agréable que possible, il n'en restait pas moins qu'il serait mal vu que personne du laboratoire ne se charge de leur souhaiter la bienvenue. Nous avions donc prévu pour la première journée un accueil par toutes les personnes travaillant sur Ève, accompagné de buffets et petites réunions.

Je passai donc ma journée à m'enquérir du bien-être de nos

invités, les informant sur les conférences à venir, sur l'organisation informelle de petites visites au labo, ou la rencontre avec certains chercheurs très demandés. Je croisai Ragal dans la soirée, et me voyant débordée et déjà exténuée, il m'obligea à faire une pause et laisser les invités aux petits soins de Symphone, ce qui leur conviendrait très bien pour le reste de la soirée. Je passai la mienne presque exclusivement avec lui, un peu à l'écart de tout cette agitation, évitant avec quelques pirouettes très amusantes de rencontrer quelques trop collant chercheurs ne pouvant plus se passer de moi. La nuit tombée nous prîmes l'air sur les terrasses ventées surplombant le vide, un peu fraîches mais désertes. C'est surtout Ragal qui parla, je n'aimais pas trop parler de moi, je préférais faire parler les autres, je posais toujours des tonnes de questions. Ce n'était pas comme quand je devais donner quelques accès à mes données quand j'avais besoin de quelque chose, pour les avis, mais je trouvais ma vie finalement inintéressante et sans grand intérêt pour autrui, je n'aimais pas en parler. Et puis même s'il était timide, Ragal aimait parler, et nous discutâmes de tant de choses. La conversation ne se finit pas trop tard, sur une insistance de sa part pour que je ne sois pas trop fatiguée pour la dure journée du lendemain.

Journée du lendemain qui fut en effet éprouvante, même si Ragal me prêta main forte et nous parvînmes à nous faire remarquer d'à peu près tout le monde comme le couple de personnes à trouver en cas de problème ou question. Même Symphone travaillait étroitement avec nous ; il savait la préférence des invités pour une entraide humaine plutôt qu'une intervention artificielle, et il nous faisait appel quand il sentait le moindre besoin que nous pouvions satisfaire, un chercheur perdu, un autre interrogatif... Les gens étaient satisfaits, les buffets copieux, les conférences savamment orchestrées, et même si tout le monde me félicitait pour la réussite de l'événement, je reconnaissais volontiers que Symphone y était pour beaucoup, et plus encore. Et en un sens je comprenais la motivation et l'espoir de Ragal dans la recherche d'intelligence artificielle toujours plus performante. Depuis toute petite j'interagissais avec des intelligences artificielles, depuis mes poupées et peluches, mon reptile, jusqu'à mes vaisseaux en passant par mon appartement, les taxis, les distributeurs... Mais j'étais tout bonnement époustouflée par Symphone. Il avait tellement de présence d'esprit, cette capacité