exister quand je travaillais au labo ou au centre de formation.
Goriodon instaura quelques règles pour les gens voulant continuer d'apprendre et rester en contact avec les artificiels développant de nouvelles technologies, mais la plupart des barrières furent instaurées par les gens eux-mêmes qui n'arrivaient pas à faire la distinction entre soif d'apprendre et soif de pouvoir.
Ces six années passèrent. J'eus plusieurs inintéressants copains, et enfin mes trente-trois ans. Et comme tous ces rêves qu'on attend depuis si longtemps, devenir adulte ne changea rien. Je ne fus pas plus heureuse même si j'étais plus libre, libre d'aller où je voulais, de sortir avec qui je voulais, même si cela faisait déjà longtemps que je prenais ce droit.
Maman et papa s'étaient séparés. Je me demandais bien de toute façon qu'est-ce qu'ils attendaient pour le faire. Ma majorité sans doute. Maman décida avec une grande partie de sa famille de rejoindre leurs aïeuls sur Stycchia. Stycchia était la planète presque la plus centrale de la Congrégation, elle bataillait la première place avec une autre planète quasi déserte à quelques années-lumière de là. Mais les planètes, les étoiles, les hommes et tout le reste bougeant sans cesse, le centre de gravité de la partie connue de l'humanité, puisque nous ne savions rien des hommes de l'Au-delà, se déplaçait de plusieurs milliers ou millions de kilomètres chaque année.
Dès ma majorité je partis d'Ève. Je m'installai dans un premier temps sur la planète Meriad'ho, presque aux confins de la Congrégation, connu pour son système riche en champ d'astéroïdes. Je me remis au pilotage et passais quelques années à m'entraîner et passer divers concours et autres championnats. Les artificiels continuaient à faire progresser les technologies des vaisseaux, et tout cela m'occupa joyeusement quelques années. Au pilotage s'ajoutant la vie paisible et facile sur Meriad'ho, planète quasi-déserte d'autre part, ce qui correspondait tout à fait à mes aspirations misanthropiques du moment.
La suite n'est pas très intéressante, j'ai bougé au gré des vents et des envies. Je m'amusais, je sortais beaucoup ou pas du tout suivant les périodes, je me mis à faire des dessins, de la musique, et
tout autre chose qui me passaient par la tête. Je trouvai une âme soeur quelques temps, un certain Goriav, qui me ressemblait beaucoup. Mais lui-même trouva une âme qui lui convenait plus encore. J'eus même l'occasion de ressortir avec Phamb, mais pas plus que quelques petits sixièmes, m'apercevant bien vite de mon erreur. Je devins un homme aussi, pendant quelques temps, mais d'accumuler les copines d'un soir m'ennuya bien vite.
Je m'ennuyais comme je m'ennuie toujours et comme je me suis toujours ennuyée. Pourtant la grande majorité des gens s'accommodait très bien du nouveau système sans travail. Tout était basé sur le contrôle mutuel, et même le statut de Goriodon n'était pas celui d'un travailleur. Le congrès sur Adama était plus l'endroit ou toute personnes voulant discuter de politique pouvait venir exposer ses idées. Mais il y avait assez peu d'évolution de ce côté là. Les artificiels s'occupaient bien de leur tâche, et apportaient de manière régulière et contrôlée quelques nouvelles musiques, nourriture, vaisseau, habits, jouets... Le rôle du Congrès était plus de trancher sur les questions qui partageaient les avis et qui ne pouvaient être raisonnablement laissées au bon vouloir des artificiels.
Je retournai sur Ève un temps. Ce fut à ce moment que je ressortis avec Phamb. Mais j'avais trop de souvenirs ici, et je ne pus y rester. Ma période sociale débuta alors par de nombreuses années sur Adama, la planète mère. J'y rafraîchis mes connaissances historiques en retraçant l'histoire de l'humanité au cours des âges, le tout par mondes virtuels interposés. Je vécus sous le joug des reptiliens, participai au MoyotoKomo, testai l'avenue de l'électricité, des ordinateurs, du bracelet, de la téléportation... J'aimais l'ambiance d'Adama, son histoire, le poids du passé. C'était à la fois l'opposé de la vie à cent à l'heure d'Ève, toujours à l'affût d'une nouveauté, mais aussi le même bouillonnement culturel, le choc des idées et des cultures, les plus grandes expositions, les plus grandes réceptions.
Après la visite de quelques anciennes planètes du commerce, je finis, comme une bonne partie de ma famille maternelle, par arriver sur Stycchia. Quand j'arrivai j'avais quatre cent ans et des poussières. Il me semblait avoir déjà tout vu, tout connu, tout ressenti. Je décidai de rapatrier mon corps initial de Ève. Je ne voulais pas qu'il restât là-bas. Et je vieillis alors. Quand je