rien du jeu dans lequel il se trouve.
- Je suis là pour t'aider...
J'ai peur de la blesser. Je reste silencieux un instant, mais je parle avant qu'elle ne le prenne mal.
- Je me demande si finalement tous vos avis ne sont pas la plus formidable façon de provoquer l'immobilisme.
- Comment ça ?
- Et bien dans la mesure où chacun doit se livrer un peu pour avoir quelque chose, j'imagine que les écarts ne sont pas permis, ne sont plus permis, il faut rester dans le moule, avoir sa petite vie comme tout le monde pour pouvoir rester tranquille, ou alors affronter l'incompréhension populaire...
- Je ne suis pas d'accord, j'ai fait tant de choses qui n'étaient pas dans la normale, et les gens, même si parfois j'ai dû affronter quelques réticences, les gens comprennent. Ils comprennent que tu veuilles tracer ta voie, faire tes propres erreurs. Mais ce n'est pas pour autant que ça doit être facile. Il faut lutter pour pouvoir se construire, sinon ton moule ne tient pas.
- Peut-être, je ne connais pas assez pour dire, peut-être ai-je juste cette impression parce que je ne comprends pas encore assez bien votre organisation.
- Prends mon cas, c'est difficile pour moi de te laisser aller dans une voie que je sais sans issue. Je connais la marche à suivre, pourtant si je te l'impose tu le prendras mal, et si je te laisse faire, je te retrouve comme aujourd'hui instigateur d'un scandale et bloqué ici. Qu'aurai-je dû faire ?
- Je comprends ce que tu veux dire, mais je pense tout de même que le système d'avis empêche la création en un sens, mais je peux me tromper...
- Je ne sais pas, chacun appréciera, mais... Je pense que ce système est tout de même profondément juste.
- Oui, juste c'est certain, mais libre ?
- C'est un peu vrai oui, chacun est sous le contrôle de tous, et par conséquent cloisonné dans les valeurs de morale et de bien du plus grand nombre, mais c'est aussi ce qui rend le système si stable, si efficace depuis le Libre Choix.
- Ce n'était pas la même chose avant ?
- Je suis née à la limite, donc je n'ai connu qu'un tout petit peu la période précédente, mais le travail obligatoire me semblait plus injuste. Certains faisant un travail très influent, possédaient plus de pouvoir sur les autres, les gens me semblaient encore moins libres qu'aujourd'hui. Mais c'est vrai que les chercheurs ont été très frustrés après le Libre Choix. Certains sont partis, et les autres n'avaient plus vraiment de motivation. Ils se moquaient de ne pas travailler, ils ne vivaient que pour ça avant...
- Vous n'avez plus du tout de recherche ?
- Si, si, comme je te l'avais déjà dit, ce sont maintenant les artificiels qui font avancer la science, mais ils le font en accord avec les attentes du peuple, ils n'apportent qu'à hauteur de ses besoins des nouveautés. Je pense qu'ils sont bien plus avancés que nous le croyons, mais qu'ils distillent lentement leur savoir pour que tout un chacun l'accepte et le comprenne.
- Mais vous devez savoir énormément de choses. Je me posais la question car nous n'avons qu'un niveau très partiel de compréhension du monde sur Terre, en ce qui concerne la nature de la matière, des forces, les origines de l'Univers...
- Nous sommes sans doute plus avancés que vous, mais nous butons sur des problèmes nous aussi. Je sais qu'il y a quelques années, quand j'avais regardé, après la découverte de tout un ensemble de particules, rapidement nous étions arrivés à un niveau beaucoup plus diffu, une sorte de fluctuation de champ d'énergie. Les artificiels ne savaient pas comment s'en sortir, comment aller plus de l'avant. Je ne crois pas que ce point de vue ait changé aujourd'hui. Je regarderai si ça t'intéresse, mais ce dont je me rappelle, c'est que plus on cherche de l'avant, plus on tombe sur des dimensions étranges