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Mon réveil fut douloureux, ce qui est assez rare pour être noté. L'apesanteur en est sans doute la cause, et j'ai une violente migraine. Mon avant bras me fait souffrir, et je découvre avec stupéfaction que le bracelet implanté la veille a été retiré. Je n'ai même pas le réconfort d'être accueilli par une charmante hôtesse, comme lors de mon arrivée sur la station orbitale téléport d'Adama. Bien au contraire je me trouve dans une capsule minuscule au couvercle transparent, réveillant divers relents de claustrophobie. Énavila, encore endormie, se trouve dans une capsule identique à la mienne située à quelques dizaines de centimètres. Je ne sais pas encore le temps de mon sommeil, aucune de mes tentatives d'ouverture d'un éventuel bracelet ne se révèlent fructueuse.

La pièce, la niche pour être plus précis, contient vraisemblablement trois capsules. La dernière la plus à ma droite semble vide, même si je n'en suis pas certain. Un hublot ne me permet pas de voir autre chose que le ciel noir rempli d'étoiles. Impossible de savoir ma situation. Cette niche ne doit pas mesurer plus de deux mètres de long, à peine plus que la longueur des capsules. En forme de demi-cercle, l'endroit le plus haut doit difficilement dépasser un mètre vingt, et la largeur au sol deux mètres cinquante. Je suis de toute évidence dans un vaisseau désuet me conduisant à la station dont parlait Symestonon. J'enrage de n'avoir pu prendre le temps de m'expliquer avec Pénoplée. Si seulement je lui avait parlé, plutôt que de vouloir absolument lui faire l'amour ! Je suis vraiment stupide !

Je me demande bien dans quelle galère je suis encore. Je me sens seul pour la première fois depuis l'Australie, perdu dans le désert. Même si je me suis aussi senti extrêmement seul après la mort de Naoma, quand Erik refusait de me parler.

Naoma... Où es-tu donc, ma belle... Où es-tu donc ? C'est sans

doute toi que j'aurais dû aimer... Bah cette vie est une ingrate, où que je sois c'est encore l'amour qui me fait souffrir... C'est néanmoins un élément rassurant de la nature humaine. Je me demande à quelle vitesse se déplace ce vaisseau. Le fond étoilé tourne sur lui-même, mais impossible aussi d'avoir une sensation d'accélération. Peut-être sommes-nous à l'arrêt, près à accoster. Ou bien au départ ? La station se trouve à neuf millions de kilomètres, quelques heures...

Même quelques heures me seraient difficiles dans cette capsule. Mais mon attente ne sera toutefois pas longue, moins d'une demi-heure plus tard la capsule descend, sortant sans doute du vaisseau par en-dessous. Quelques secondes plus tard, Sarah, Yamwreq, Metthios et trois autres ouvrent le sas de la niche. Leur position laisse suggérer qu'il y a tout de même un semblant de gravité. La paroi vitrée de ma capsule se sépare en deux et disparaît sur les côtés, celle-ci s'avance d'une cinquantaine de centimètres en dehors de la niche et la partie à l'extérieur s'incline pour faciliter ma sortie. Je dois tout de même me faire glisser, ce qui n'est pas des plus pratique. Yamwreq plaisante :

- Vous avez du mal à sortir ! Vous imaginez sans doute aisément combien nous avons dû en patir pour vous glisser endormi là-dedans !

- Je n'aurai pas fait d'histoires si vous m'aviez laissé éveillé.

Yamwreq redevient sérieux et tente de se justifier :

- Nous sommes dans une situation difficile, comprenez-nous.

Metthios rectifie :

- Symestonon et Goriodon sont dans une situation difficile...

Yamwreq calme le jeu, les autres ne disent rien. Sarah me retient quand je manque de partir en avant, surpris par la faible gravité.

- Marchez doucement, la station ne maintient qu'une gravité de l'ordre du vingtième de celle d'Adama.